Publié le 9 octobre dernier aux éditions L’Atalante, Une très bonne hérétique est un recueil inédit de 5 nouvelles de Becky Chambers, dont une dans l’univers de la saga des Voyageurs. J’aime généralement me garder un Becky Chambers en pile à lire pour les coups durs, mais je n’ai pas su attendre pour celui-ci tant il tombait à pic. Et voici donc ce que j’en ai pensé… Pour celles et ceux qui n’ont jamais lu Becky Chambers, voici un court rappel de pourquoi vous devez absolument commencer à le faire: ses écrits font vraiment beaucoup de bien. L’autrice nous propose des récits de science-fiction positifs, portés par l’idée qu’il reste de l’espoir en l’avenir, que nous pouvons construire autre chose de mieux, faire ressortir les bons côtés de nous-mêmes et vivre ensemble. Et ce sans que ce soit niais ou mielleux. Ces avenirs semblent plausibles, ils ne sont jamais parfaits mais portent en eux l’intention de s’améliorer. Elle redonne de l’espoir aux plus pessimistes d’entre nous, croyez-moi. Et c’est aussi toujours extrêmement intelligent. Alors évidemment, un recueil de 5 petites nouvelles est un peu frustrant, tant on aimerait lire du Becky Chambers encore et encore, surtout par les temps qui courent. Mais il n’empêche que ces 5 petites douceurs pour l’âme réussissent tout de même l’éternel exploit des récits de l’autrice: faire du bien. Il y a de l’aventure, de l’émotion, des doutes et de l’empathie. Bref, de l’humanité (même avec des protagonistes non-humains) mais avec un accent sur des belles valeurs. Ces 5 nouvelles ont plusieurs points communs. D’abord parce qu’elles mettent en scène une protagoniste femme à un tournant de son existence. Mais aussi pour les messages qui s’y glissent. On parle ici beaucoup de relation à l’autre, de liens, de l’importance aussi des relations contre la solitude. C’est un ensemble harmonieux et touchant qui m’aura, le temps d’une (trop) courte lecture, coupée du monde pour mieux me rappeler ce qui est important. Et c’était exactement ce dont j’avais besoin. Je vais maintenant vous retranscrire les courts avis que j’ai écrits à l’issue de chaque nouvelle pour vous donner une idée de ce qui m’a plu. Dernier contact Nouvelle très courte mais magnifique qui m’a rappelé la novella Apprendre si par bonheur puisqu’elle traite un peu des mêmes sujets. Dénonciation des profits face à la richesse des connaissances, déclaration magnifique et touchante d’une humaine à d’autres créatures, Dernier contact est une respiration un peu triste mais aussi très belle. Et une belle entrée en matière dans un recueil plein de douceur. Extraits: « Quel plus grand profit qu’étendre ses connaissances? » « Vous n’êtes pas seuls. Je vous prie, comprenez-le: aucun de nous n’est seul. » La Troufionne, l’Épee nova et les Textes tri-chantés Oh que j’ai aimé! Je ne vous cache pas avoir été très émue encore une fois. On est ici sur une narration très différente du premier texte avec les retranscriptions des journaux personnels du personnage principal qui vient de comprendre que ce qu’elle enregistre est écouté. Sa vie, complètement bouleversée, est relatée par ses confidences sans réponse dans lesquelles transparaissent ses doutes, ses failles, son manque d’estime de soi et ses peines. Mais également son caractère bien trempé et immédiatement attachant. Dans la position de la personne qui écoute mais n’échange jamais, le lectorat plonge dans son intimité et ce qui lui arrive. Pour revenir, comme toujours avec Becky Chambers, à la justesse des émotions et à la force des liens. Extrait: «La seule personne qui sait qui je suis depuis le début, c’est toi. Si tu existes. Il faut que tu existes - j’ai besoin de savoir qu’une personne dans l’univers me voit. Voit la personne que je suis réellement. Et peut-être… Peut-être me trouve pas si mal, même si je ne suis pas l’archétype parfait que l’humanité désire. » Chrysalide Toute petite nouvelle, Chrysalide parle d’une mère et sa fille, d’aspirations et de rêves qui ne sont pas forcément conformes aux attentes de nos proches mais surtout d’amour filial. C’est touchant, là encore. Simple, efficace, et plein d’humanité. Que ce recueil fait du bien!! Extrait: « Je veux t’emmener avec moi. » Je l’ai serrée contre moi, aussi fort que le permettrait mon corps mou. « Je suis toujours avec toi ». Le Vaisseau cercueil Dans cette nouvelle plus longue que les précédentes, on est plongé dans un futur bien malheureux, où après de nombreuses guerres, la vie semble difficile et contraint certaines personnes à se battre pour n’importe quelle ressource. Cela change des environnements auxquels nous habitue l’autrice, il y a ici pas mal de désespoir. Mais il y a aussi de la lumière dans ce texte, notamment grâce à son héroïne qui est très intéressante, imparfaite mais formidable. Réussir à sortir de la noirceur pour faire le bien est bien plus difficile quand on a toutes les raisons du monde d’être égoïste. Et pourtant… Extrait: « Le monde n’avait pas besoin d’une reine. » Voyageurs: une bonne hérétique Quel plaisir de retrouver l’univers de la saga Les Voyageurs pour cette dernière nouvelle du recueil. On explore ici la culture d’une des espèces les plus énigmatiques de cet univers, avec ses règles de vie très particulières, ses croyances et ses coutumes strictes. C’est beau, mélancolique, tendre et bienveillant. J’ai été profondément émue par ce texte qui m’a rappelé tout ce que j’aime dans la saga Les Voyageurs: son ouverture d’esprit, son inclusivité et l’espoir qui s’en dégage. Avec ici un questionnement sur la non-conformité, le refus de blesser ses parents mais aussi l’impossibilité de continuer de faire semblant et de cacher sa propre identité. C’était superbe. Ça a plusieurs niveaux de lecture. Et ça fait tellement de bien!!! Extrait: « Parfois, Mas, prendre soin d’un seul lieu, d’un seul groupe… Vraiment, c’est suffisant. » En bref, Une très bonne hérétique est évidemment un coup de cœur. Les 5 nouvelles qui composent ce recueil éclairent, de manière différente, l’importance des liens, l’importance du commun et de l’empathie dans des univers futuristes pas toujours utopiques mais mettant en scène des héroïnes aux belles valeurs. Ce sont 5 petites douceurs pour l’âme qui font un bien fou et qui redonnent espoir. Il tombait au bon moment, c’était doux et réconfortant. Vraiment, lisez Becky Chambers! Résumé : « Cinq nouvelles où cinq femmes sont chacune à une croisée des chemins : dans le cadre de leur travail, de leur engagement pour la société, de leur parentalité, de leur avenir. C’est aussi banal, joyeux et déchirant que nos vies, faites de routines et de pas de côté toujours renouvelés ; mais avec des vaisseaux spatiaux. Sachez que le dernier récit nous offre une ultime excursion dans l’univers des « Voyageurs ».» (Illustration de couverture : © Nicolas Sarter - Livre reçu en service de presse. Publication non rémunérée. Merci aux éditeurs. - > Content warning
![[Logo "Le Mois de l'Imaginaire"]
Chaque mois d’octobre depuis 2017,
c’est le mois de l’imaginaire, qui vise
à faire connaître les littératures
de science-fiction, fantasy et fantastique (SFFF).
Cette année, le thème est l’altérité.
C’est un thème assez présent
dans les littératures de l’imaginaire :
que ce soit l’alien, celui qui est autre,
ou la découverte d’autres mondes,
cachés au fond d’une armoire.
Car les littératures de l’imaginaire
offrent un regard sur d’autres possibles.](https://toot.portes-imaginaire.org/system/media_attachments/files/115/298/158/052/242/004/original/3fc8105b537e3b61.png)
